Le Chêne-Liège et sa culture

Quercus Suber (en latin) – Cork-Oak (en anglais) – Surrier ou Corcier (en gascon)

fait partie de la famille des Fagacées. Il se trouve essentiellement autour du bassin méditerranéen Portugal, Espagne, Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie), Sardaigne, Sicile, Italie, Corse, et en France Métropolitaine (Var, Catalogne, Sud-ouest).C’est un arbre qui appartient à la flore européenne depuis l’ère tertiaire, ce qui lui donne une soixantaine de millions d’années d’existence. Il se trouve principalement en peuplement mélangé, associé au chêne vert, au chêne pédonculé et au pin maritime dans le cadre d’une futaie irrégulière ou d’un taillis sous futaie.Dans le cadre de la production de liège, on le trouve en futaie régulière et peuplement pur. Son aire de développement dépend du relief et on ne le trouve pas au delà de 1400 mètres d’altitude (il s’élève jusqu’à 650 m dans les Pyrénées-Orientales, 1000 m en Algérie). Il recherche les sols feldspathiques et schisteux, craint le calcaire et se défend assez mal lorsqu’il est en concurrence avec d’autres arbres développant une cime importante. Il a besoin de chaleur, de beaucoup de lumière, d’une humidité assez élevée et surtout de sécheresse, bien qu’il supporte les hivers pluvieux (précipitations annuelles non inférieures à 600 mm par an). Il souffre aussi des gelées tardives. Tout ceci réduit quelque peu son aire naturelle de développement. Par exemple, on a fait des essais de culture en Amérique, au japon, en Russie : on a obtenu de beaux arbres mais guère de liège.
– Le chêne liège peut atteindre 20 m de hauteur et 5 m de circonférence.
– Cette espèce monoïque et pseudo sempervirente (toujours vert), fleurit d’avril à mai, avant la feuillaison.
– Il est pollinisée par les insectes puis dispersée par les animaux.
– Sa longévité est de 150 à 200 ans soit en moyenne plus de 12 récoltes par arbre. Il peut atteindre 300 ans sans récolte.
– Il possède un fort enracinement lui permettant de bien résister aux vents, grâce une racine pivotante qui se développe en profondeur, ainsi que de nombreuses racines latérales.
– Son tronc est court et flexueux avec une écorce liégeuse, épaisse, boursouflée et crevassée.
– Ces fleurs sont unisexuées : mâles en chatons pendants jaunâtres et femelles minuscules.
– Vers l’âge de 15 ans, il commence à porter des glands allongés (2-3 cm de long) de couleur rouge brique, dans une cupule à écailles inégales, mûrissant en 2 ans.
– Ses petites feuilles (3-5 cm) sont coriaces, sans poils sur le dessus, velues cotonneuses et d’un blanc grisâtre en dessous, et persistent pendant 2 ou 3 ans. Le limbe, porté par un pétiole, est ovale allongé, bordé de dents épineuses et présente, de chaque côté de la nervure principale, 5 à 7 nervures secondaires.
– C’est un bois très dense et très dur, difficile à travailler et donc peu utilisé. Sa production principale est bien sûr le liège.
– Il se reproduit de façon naturelle, par semis des glands ou plus souvent par rejets. Cependant, cette reproduction est améliorée par les soins dont on l’entoure (développement de sylviculture spécifique au Portugal – 1er producteur avec 50% – par exemple terrains propres et de bonne santé, et arbres soigneusement élagués).
Les chênaies sont parmi les systèmes naturels les mieux régulés au monde et sont considérés comme des trésors nationaux. Elles contribuent à purifier l’atmosphère des émissions polluantes, et permettent de réduire le besoin de recourir à d’autres industries polluantes. L’écorce épaisse, peu combustible et isolante du chêne-liège ne brûle que superficiellement et protège les tissus conducteurs de la sève en même temps que l’assise génératrice du liège. Après un feu, des bourgeons « dormants » sous l’écorce se réveillent et donnent naissance à de nouvelles pousses. Ce qui permet au chêne-liège, environ vingt mois après le passage du feu, de reformer une couronne végétale. Toutefois privé de son écorce protectrice, le chêne-liège est incapable de se défendre contre le feu. On a ainsi pu établir que la mortalité atteignait 100 % immédiatement après le déliégeage, 70 % après trois ans et seulement 2 % pour les lièges de neuf ans. Il est noté par ailleurs, que dans le cas d’incendies répétés d’une année sur l’autre, l’écorce atteinte une première fois aura perdu son effet protecteur. De même, les sujets trop jeunes ne résisteront pas aux flammes dans leur partie aérienne mais possèdent une faculté étonnante de régénération par rejet au niveau du collet de la racine.

Ecogramme
Xérophiles            
Mésoxérophiles            
Mésophiles            
De milieu frais            
Hygroclines            
Mésohygrophiles            
Hygrophiles            
  Trés acides Acides Assez acides Peu acides Neutres Calcaires

Légende:           Optimum        Fréquence plus faible

La Production

La production mondiale de liège est estimée à 340.000 tonnes/an répartie comme suit :

PAYS Tonnes/An Hectares
Portugal 185.000 725.000
Espagne 88.000 510.000
Italie 20.000 225.000
Maroc 18.000 198.000
Algérie 15.000 460.000
Tunisie 9.000 60.000
France 5.000 22.000
TOTAL 340.000 2.200.000

 

A noter que la production française pourrait être de 10.000 tonnes si toutes les forêts étaient exploitées (Catalogne, Var, Gascogne Landes et Corse). En France, l’aire subéricole serait selon l’Inventaire Forestier National de 108 000 ha, mais seulement de 22 000 ha en surfaces corrigées. Elle est localisée principalement en zone méditerranéenne (qui comprend la zone côtière, la basse plaine et l’arrière-pays dont l’altitude ne dépasse pas 700 m) :

DEPARTEMENTS Hectares Pourcentage
Var 12980 59 %
Corse 6380 29 %
Pyrénées-Orientales 2200 10 %
Alpes-Maritimes 220 1 %
Landes 220 1 %

Près de 90 % des suberaies françaises sont privés, les 10 % restants se répartissent entre la forêt domaniale (3 %) et la forêt communale (7 %). Les superficies ont considérablement régressé (elles s’élevaient à 200 000 ha au début du siècle).

La Plantation

La simple protection des chênes lièges spontanés suffit à assurer le boisement rapide d’énormes étendues, si puissante est la régénération naturelle en beaucoup de régions. C’est ainsi que ce sont formées les forêts portugaises de chêne liège et c’est d’ailleurs le procédé le plus économique pour créer de nouveaux peuplements. La régénération naturelle est assez forte chaque année, et présente une bonne glandée.
Mais cette régénération a deux inconvénients : 
– à cause du maquis, les jeunes plants n’arrivent pas à se développer
– la régénération sur rejet de souches donne du liège de mauvaise qualité.
Les peuplements peuvent aussi être artificiels : 
– à partir de glands de Chêne liège de bonne qualité. Il faut semer 2 à 3 jours après la récolte ( une fois tombés sur le sol humide, ou même conservés par les procédés communs, les glands commencent à germer et en les manipulant les radicelles peuvent être cassées). D’autre part, comme la racine principale se développe rapidement au cours des premiers mois et atteint une grande profondeur, le semis précoce permet aux plants de mieux se défendre contre la chaleur estivale. On obtient alors un taux de réussite de 95 à 100 %. La densité moyenne de semis est de 5 000 glands/hectare (il faut tenir compte de la destruction des glands par les animaux sauvages).
– à partir de reboisement par transplantation de jeunes chênes lièges dont les racines sont nues (on obtient 50 à 60 % de réussite). L’insuccès est encore croissant lorsque les chaleurs estivales se prolongent. La transplantation de chênes lièges cultivés en pots est la plus sûre mais la plus chère et elle n’a été employée que rarement au Portugal.
Lors de la plantation, il n’est pas conseillé de labourer avant car le sol, après défrichement, subit une évaporation intense pendant les chaleurs estivales et atteint de hautes températures auxquelles beaucoup de chênes lièges succombent au cours de leur première ou leur deuxième année. Il est donc préférable d’effectuer la mise en valeur partielle, soit par bandes dans le cas de semis en sillon, soit, dans le cas de semis en trous, par éclaircies des broussailles de façon à procurer un certain dégagement aux jeunes plants dès les premières années. Quand le semis est fait à la volée dans un champ cultivé, on éparpille les glands sur le sol et on les recouvre en passant la herse.

L’entretien des suberaies

Tout d’abord il faut signaler que les plants doivent être protéger contre les dégâts du gros bétail (bovins, caprins, équidés). Le pâturage est courant sous les forêts de chênes lièges et il n’est pas facile de supprimer ces habitudes dans des régions à production de liège «non industrielles».
Le caractère extensif encore accordé à cette culture et le rendement modeste des subéraies par unité de superficie ne permettent pas d’augmenter les soins de culture. Les moyens mis à disposition du subériculteur sont donc limités, mais les soins apportés à la culture donnent des résultats exceptionnels, et leur utilité est incontestable.
D’une part, il faut empêcher, par le débroussaillage, que la végétation spontanée concurrente du chêne liège le prive, au cours des premières années, de l’eau et des éléments minéraux dont il a besoin. Le girobroyage se fait donc régulièrement pour l’entretien de la subéraie, il coûte cependant cher et fait que bien des subéraies ne soient plus entretenues.
D’autre part, les jeunes chênes lièges présentent de bonne heure, à la base, une abondante ramification formant un buisson. Le tronc bifurque fréquemment à une faible hauteur, par suite de la disparition de la flèche causée par la mort du bourgeon terminal, comme on le voit pour beaucoup d’autres chênes. Il faut donc faire un élagage de formation qui est d’une grande importance pour l’avenir. Il permet d’obtenir des troncs élancés et droits, sur lesquels les ramifications s’implantent à 2,5 à 3 mètres au-dessus du sol (c’est la conformation la plus avantageuse pour le déliégeage). Le premier élagage a lieu, suivant le développement des plants, entre la quatrième et la sixième année, et le deuxième environ à dix ou douze ans.
Et enfin, il est nécessaire de réaliser des éclaircies au cours de la croissance de la forêt de chênes lièges afin de laisser les meilleurs arbres se développer comme il faut et d’éliminer les éléments les moins viables pour l’avenir. Les éclaircies doivent donc avoir dès le début, un caractère sélectif. On supprime les individus mal développés, rabougris, ou défectueux, non par une simple coupe au ras du sol (car ils se régénèreraient par des rejets) mais en les arrachant avec la racine.

Norme de la suberaie : 

Classe Circ. à 1,3 m 
(cm)
Densité
(plants/ha)
Ecartement théorique
(m)
I <50 290 5.9
II 51 à 80 72 11.8
III 81 à 110 30 18.3
IV 111 à 140 19 22.9
V > 140 14 26.7

Classe III : arbres en pleine production
Classe IV : arbres proches de la limite d’exploitation économique

Les principales menaces pour le chêne-liège

Différents insectes et champignons interviennent dans le dépérissement fréquent des peuplements de chêne-liège.
Les xylophages : le capricorne du chêne (Cerambyx cerdo) et le bupreste du chêne (Coroebus bifas-ciatus) causent respectivement des altérations du tronc et des dessèchements de branches. La fourmi du liège (Crematogaster scutellaris) affecte le liège et la « mère » (tissu compris entre le bois et le liège). Le platype (Platypus cylindrus) s’attaque aux troncs démasclés.
Les défoliateurs : ce sont le bombyx disparate (Lymantria dispar) et la tordeuse verte du chêne (Tortrix viridana). L’arbre perd ses feuilles en juin. Les attaques sont cycliques.
Les champignons : 
– Diplodia mutila (attaques sur arbres blessés lors du démasclage).
– Hypoxylon mediterraneum (ou maladie du charbon de la mère).
– Phytophtora cinnanomi (l’encre), qui vient d’être mis en évidence.
– Armillaria medea, champignon bactériomycète existant dans la racine des plantes.
Les causes du dépérissement des suberaies
En fait, le dépérissement peut s’expliquer par la conjonction de trois types de facteurs :
– les facteurs prédisposant : les peuplements vieillis ou récemment incendiés, ou en exposition sud, ou sur des stations à trop faibles réserves en eau.
– les facteurs déclenchants : les épisodes de sécheresse estivale marqués ces dernières années, notamment en France (1985,1989,1990,1991), ont considérablement affaibli les arbres qui sont relativement exigeants en eau (en période estivale, ils ont besoin d’une humidité atmosphérique élevée).
– les facteurs aggravants : les facteurs prédisposant et déclenchants ne provoquent pas à eux seuls le dépérissement des arbres. Il est nécessaire que des facteurs aggravants interviennent : insectes, champignons ou encore l’homme, par un démasclage mal effectué (blessures à la mère), de mauvaises façons culturales ou des prélèvements («levées») exagérés.
En France, un facteur supplémentaire aggrave le mauvais état sanitaire des subéraies : la disparition du pin maritime de 1960 à 1988, en sur étage des subéraies, a donné un « coup de fouet » au chêne-liège, qui a eu une alimentation hydrique déséquilibrée en période estivale, tandis que le milieu ambiant devenait plus sec. Associé aux incendies, à l’absence d’entretien et d’exploitation, aux sécheresses estivales marquées ces dernières années, ces éléments ont pour effet de placer les subéraies en état de moindre résistance.